Centre culturel de la Fondation Stavros Niarchos – ”Et la beauté jaillit de terre !”

C’est une splendeur, une réussite indéniable. Ayant mal regardé le plan, nous sommes arrivés en contresens, par la petite entrée, au bout du canal. Mais de là, la perspective est absolument renversante. Nous sommes restés plusieurs minutes, les yeux grand ouverts, frappés par la perfection du lieu, tout de verre et d’acier. De loin, ça ressemble à une piste de décollage tapissée de verdure, d’où s’envolerait un biplan.

Nous nous sommes rapprochés à fond de train, en suivant le canal, stupéfaits de l’élégance, de la légèreté de l’ensemble qui réussit à se faire aérien, céleste. Plus on avance et plus les idées fusent pour comprendre le travail de Renzo Piano : « attends, non, ce n’est pas un avion qui s’élance, c’est un livre ouvert », « non, c’est un temple avec ses colonnes sur une nouvelle colline » (Renzo Piano a en effet fait construire une colline artificielle pour que le Centre Culturel domine son environnement et surplombe la mer). Quand un bâtiment ouvre au premier regard des pistes de réflexion, c’est que l’architecte a été très inspiré (on remarquera juste qu’il s’est beaucoup moins foulé pour le nouveau Palais de Justice des Batignolles, qui ressemble à un simple empilage de clipos).

C’est en 2006 que naît le projet, porté par la Fondation Stavros Niarchos. Ce dernier, armateur et collectionneur d’œuvres d’art décède en 1996, et lègue 20% de sa fortune (soit 1 milliard de dollars) à une fondation qui finance des projets culturels, éducatifs et sociaux, sur toute la planète. C’est donc avant la crise économique que l’initiative de doter Athènes d’un centre culturel public est actée et maintenue, malgré l’effondrement du pays. Que pour une fois la culture ne soit pas sacrifiée sur l’autel de l’économie est déjà un miracle.

Dix ans plus tard, le site est sorti de terre à Kallithéa (« la jolie vue », sous-entendu, sur la mer), dans la banlieue d’Athènes, au bout de l’avenue Syngrou, sur l’emplacement d’un ancien hippodrome devenu parking. En tout, 23 hectares accueillent un parc monumental (si Athènes manque bien d’une chose, c’est d’espaces verts), où sont organisés concerts et activités sportives, et un ensemble architectural si réussi, en trois parties : l’Opéra National Grec et la Bibliothèque Nationale, reliées par un lieu de rencontre qui s’ouvre sur une placette (l’Agora). Le long de la bibliothèque, un canal d’eau de mer rappelle que cette dernière est toute proche et vient un peu rafraîchir l’ensemble (les enfants du quartier s’initient à la voile sur ce long bassin).

Il nous faudra revenir, car il nous a été impossible de monter sur le « Phare », cet espace situé sur le toit de l’opéra d’où la vue est grandiose (le jour de notre passage, l’Opéra avait été privatisé pour recevoir des huiles locales). L’intérieur du bâtiment abrite deux salles de spectacle, dont l’une, construite à l’italienne dans un rouge claquant, dispose de 1 400 places.

DR

Mais plus encore que l’Opéra, c’est la bibliothèque qui nous a soufflés, conçue pour recevoir 750 000 volumes. La conception intérieure est aussi magnifique que l’écrin. On a la tête qui tourne en rentrant, cernés de livres sur une hauteur vertigineuse. C’est moderne, clair, fonctionnel, lumineux, et à l’abri du soleil extérieur, à la différence de notre inconcevable BNF (mais l’architecte, Dominique Perrault, se réclamait d’une “esthétique du paradoxe ” : il a à sa façon réussi !). De nombreuses salles accueillent étudiants et chercheurs, avec toute la modernité nécessaire, en libre accès. Si ma vieille université avait possédé pareil environnement de travail…

Il existe une navette gratuite entre Syntagma et le Centre culturel, avec un arrêt à la station de métro Syngrou-Fix, qui part chaque demi-heure. Tout a été pensé jusqu’au moindre détail pour faire de ce Centre Culturel un lieu ouvert à tous, accessible, pratique et réellement somptueux.

Pas encore trop de monde pour arpenter le jardin et la bibliothèque dans ce lieu excentré, profitez-en !

Deux photos trouvées sur des sites d’architecture, certainement prises grâce à un drone

1 Comment

  1. Reply
    Dominique Proz

    Je n’ai pas encore eu l’occasion d’y aller, mais ton billet m’y encourage et dès que les températures seront plus clémentes, je vais m’y rendre pour en profiter.

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