La Flandre peut paraître une destination un peu fraîche pour un mois de novembre, mais après le joli périple anversois, une envie de maisons à pignons dentelés, de balades à vélo, de béguinages et de bonnes bières est venue nous chatouiller l’humeur. Pas de fringale pour Bruxelles en hiver, de caprice pour Ostende déserte dès les premiers frimas, ni de tocade pour Bruges, la ville-musée assoupie. Gand a l’avantage de mêler tout ce que l’on aime des vieilles villes flamandes à une modernité maîtrisée. La cité est vaste, bigarrée, opulente, généreuse, fière de son passé mais aussi bien campée dans son temps, éveillée, dynamique et très attrayante.

 

Le centre historique ne se résume pas à une large place bordée de maisons de guildes, il est étendu, aéré, dans la boucle que forment les deux fleuves de la ville, la Lys et l’Escaut. Tout au Sud, le quartier des Arts et des musées ; au Nord, Patershol et Prinsenhof, les quartiers médiévaux rénovés. Quatre jours sont nécessaires pour arpenter Gand en tous sens, à pied et en vélo, pour visiter quelques musées, longer les quais en bateau, goûter aux douceurs sucrées d’une ville très gourmande, profiter de la sérénité des habitants qui savent prendre leur temps.

Le Thalys vous dépose à Bruxelles et toutes les heures en hiver, un train relie la capitale belge à Ostende, en passant par Gand, puis Bruges. Attention à ne pas vous emmêler les pinceaux avec le flamand, votre train part pour Gent et non pour Genk, autre destination à l’opposé de la première. Heureusement que ma moitié est là pour corriger inlassablement mon désastreux sens de l’orientation…

L’office de tourisme gantois est un passage obligé pour retirer la City Card, bien pratique pour accéder aux tramways, aux bus et aux musées. Elle comprend aussi une balade en bateau que nous n’avons pas regrettée. Le souci, c’est que cet endroit est fort mal indiqué. Situé au pied du château des Comtes, sur la Sint-Veerleplein, il faut passer sous la statue de Neptune, visible de loin avec son trident, gardien de l’entrée de l’ancien Marché aux Poissons, pour y accéder. Les employés sont très serviables, patients et débrouillards, surtout quand il s’agit de nous trouver deux vélos pour ce long week-end du 11 novembre. Une seule adresse dès le mois d’octobre, Max Mobiel, derrière la gare Saint-Pierre, atelier de réparation et loueur de lourdes bécanes bien entretenues. Faire vraiment très attention dans le centre historique ultra fréquenté, entre les piétons, les locaux en vélos qui foncent comme des brindezingues, les bus, les voitures, et surtout les tramways et leurs rails, traîtres en diable.

 

Les hôtels ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Le Routard donne une liste de B&Breakfast et de chambres d’hôtes bien fournie. Nous nous sommes posés chez Simon Says, dans le Prinsenhof, lieu de rencontre des Gantois du quartier, du petit-déjeuner au goûter tardif. Au-dessus de ce petit café convivial qui ne désemplit pas de la journée, on peut louer deux grandes chambres design joliment agencées. Le lieu est tenu par deux Anglais avenants et bien faits de leur personne, ce qui ne gâche rien. Si votre estomac crie encore famine après le petit-déjeuner pantagruélique (produits bios, ça va de soi), vous pouvez aussi y déjeuner sur le pouce (soupes, tartes salées, sandwiches savoureux et desserts alléchants). Tout est fait maison et orienté végétarien, ne boudons pas notre plaisir. La température glaciale n’empêche nullement les Gantois de rester au grand air, chaque café et restaurant fournissant des couvertures à leurs clients.

Pour profiter au maximum des courtes journées d’hiver, nous avons fait l’impasse sur de vrais déjeuners, nous contentant de grignoter entre deux visites. Mais lorsque le soleil se couche, il est temps de suivre les locaux vers les temples de la gourmandise. Max est une vieille pâtisserie (1839 !) à la déco Art Nouveau, où seraient nés la gaufre et le beignet soufflé aux pommes. La légende dit ce qu’elle veut, mais on la croirait sans problème lorsqu’arrivent sur votre table ces deux merveilles. L’ambiance est familiale, le service vif mais affable, voilà un bel endroit, certes un brin touristique, mais incontournable.

Á quelques pas, le chocolatier artisanal qui a fait chauffer la carte bleue, Luc Van Hoorebeke… j’ai peu de goût d’ordinaire pour le chocolat belge, que je trouve trop gras et trop sucré. La seule joliesse de la boutique m’avait faite entrer, mais lorsque la gentille dame me mit dans la bouche le plus fin des pralinés, je remisais au placard mes préjugés et dévalisais le présentoir. Nous y sommes même retournés le lendemain, la première réserve ayant servi de carburant lors d’une balade nocturne le long de la Lys.

Pas très loin de la place Sint-Veerleplein, on trouve la petite boulangerie Himschoot, l’une des plus anciennes de la ville, qui propose des pains et des biscuits qui valent le détour. L’espace est réduit mais déborde de ces bons gros pains du Nord, riches de céréales brutes, de levains bien prononcés, de fruits secs, dodus, riches, lourds en main, mais savoureux en bouche. On y trouve toutes sortes de biscuits secs et des spéculoos maison délicats et aériens.

Côté assiette, coup de cœur pour le Belga Queen, sur le quai Graslei, niché dans un ancien entrepôt du XIIIème siècle, tout en pierre et poutres apparentes. Le lieu est magnifique, à la fois contemporain, raffiné mais dans le respect du vieux bâtiment. La carte est orientée poissons et nous nous sommes régalés de saumon massé à la Rodenbach, d’anguille de l’Escaut fumée, d’un bar poêlé́ avec son risotto d’orge et coques, et d’un délicat turbot rôti. Les vins termineront de ratisser votre portefeuille mais nous ne regretterons pas ce dîner dans un cadre enchanteur.

 

Pour le dîner suivant nous avons choisi un tout autre endroit, beaucoup plus simple, car nous l’avons vu déborder de jeunes qui l’ont adopté comme QG, le Grand Café Godot. On dîne dehors, les genoux sous une bonne couverture, de tapas, de bruschetta, de pâtes bien garnies, arrosés d’une bonne bière. L’endroit est parfait pour observer la vie nocturne gantoise, c’est sympa, sans prétention et on s’y sent très bien. Nous avons choisi pour le dernier dîner la brasserie Packhuis, d’abord pour le décor mais la table se tenait tout à fait debout. Il s’agit là aussi d’un ancien entrepôt daté XIXè dont on a gardé la structure métallique. Nous avons craint une cuisine standardisée mais que nenni : croquettes de crevettes, sashimi de bar, faisan et saumon, revisités à la mode de Flandre, bonne bière locale, une bonne surprise que nous recommandons.

A contrario de toutes ces bonnes choses, éviter le cuberdon, sucrerie locale composée de gomme arabique violette fourrée d’un sirop très sucré aux fruits rouges ; déjà peu appétissante à voir mais quelconque en bouche.

Vélos MAX MOBIEL / Voskenslaan 27http://www.max-mobiel.be/Home

B&B SIMON SAYS / Sluizeken 8 / http://simon-says.be/fr

Pâtisserie MAX / Goudenleeuwplein 3 / http://www.etablissementmax.be/en

Chocolatier Luc Van HOOREBEKE / Sint-Baafsplein 15 / http://www.chocolatesvanhoorebeke.be

Boulanger HIMSCHOOT / Groentenmarkt 1 / http://www.bakkerijhimschoot.be

Restaurant BELGA QUEEN / Graslei 10 / http://www.belgaqueen.be/fr/Ghent.aspx

GRAND CAFÉ GODOT / Hooiard 8 / http://www.godotgent.be

BRASSERIE PAKHUIS / Schuurkenstraat 4 / http://www.pakhuis.be/fr